Test Tales of Kenzera : Zau – une histoire touchante pour un jeu bancal

Première production du tout jeune studio Surgent, fondé par Abubakar Salim (voix de Bayek dans Assassin’s Creed Origins), c’est peu dire que nous attendions impatiemment Tales of Kenzera : Zau. Jeu fondé sur le deuil personnel de Salim, qui en interprète également le héros (en anglais). Cela suffit-il à en faire une réussite vidéoludique ? Rien n’est moins sûr, comme on va le voir dans ce test.

Une histoire personnelle

Le Metroidvania. Un genre qui a décidément la cote dans le milieu des productions indépendantes, qu’elles soient soutenues par de petits ou gros éditeurs. Dans le cas de Tales of Kenzera : Zau, c’est la seconde option. Pour leur premier jeu, Surgent ont pu compter sur l’appui d’EA et son label « Originals » pour offrir au public leur première production. Celle-ci s’appuie donc sur le genre très prisé du Metroidvania pour raconter un récit sur l’acceptation du deuil, le tout sur fond de culture Bantoue.

Tales of Kenzera Zau screenshot PS5

L’histoire suit celle de Zau, un jeune shaman qui, ne parvenant pas à accepter la mort de son « baba », en appelle au dieu de la mort. Ce dernier se présente à lui et ensemble, ils passent un pacte : Si Zau parvient à donner le repos à 3 grands esprits souffrants, il pourra alors revoir son baba. Une histoire en réalité lue par Zuberi, un jeune homme qui vient également de perdre son baba, auteur de l’aventure que nous allons vivre.

Comme on l’a dit, le jeu est une sorte d’exutoire pour Abubakar Salim, le créateur du jeu. Ce dernier à perdu son père en 2013 et tente, avec Tales of Kenzera : Zau, de faire son propre deuil. C’est d’ailleurs l’une des premières forces du jeu. On ressent sans peine la sincérité avec laquelle Abubakar Salim et ses équipes développent ce sujet.

Tales of Kenzera Zau screenshot PS5

Pour eux-mêmes, mais aussi celles et ceux qui pourraient toucher au jeu et seraient également en proie au deuil. Cela dit, peut-être que le genre Metroidvania n’était peut-être pas le plus adapté pour conter un tel récit. Tout du moins pas avec ces mécaniques aussi bancales…

Tales of Kenzera : Zau n’exploite pas assez son gameplay…

Comme bon nombre de ses modèles, Tales of Kenzera : Zau est un Metroidvania, ici en 2,5D. En termes de gameplay, le jeu tourne principalement autour d’un masque qui arbore 2 faces interchangeables à la volée : La lune et le soleil. Le premier privilégie le combat à distance et le second le combat rapproché. Par la suite, il est possible d’améliorer les capacités de combats en débloquant diverses compétences, mais aussi des « bibelots ».

Il s’agit d’objets donnant des bonus permanents lors des combats et à équiper grâce à des établis ou encore des pouvoirs à récupérer au cours de l’aventure. Contrairement aux compétences et bibelots, ces derniers sont immanquables puisque nécessaire au bon déroulé de l’aventure. Les premières heures sont franchement très engageantes. Le gameplay manette en main est très loin d’être désagréable, les combats s’enchaînent assez bien, l’idée de changer de masque à la volée permet de jolis enchaînements…

Tales of Kenzera Zau screenshot PS5

Jusqu’à ce qu’après environ 3h de jeu en prenant son temps (ce qui correspond à peu près au 1/3 de la durée de vie), les soucis commencent à se faire de plus en plus évidents et de plus en plus agaçants. Pour commencer, dommage que le système de combat n’exploite pas franchement le concept du masque, le titre se contentant dans le meilleur des cas de combiner des ennemis protégés par des boucliers qu’il faut alors briser soit avec des dégâts rapprochés, soit des dégâts à distance.

Mais autant les combos sont agréables au début, autant les (trop) nombreuses phases d’arènes (ces fameux passages fermés ne s’ouvrant qu’après avoir vaincu les ennemis d’une zone) finissent par rendre les combats chaotiques et ingérables, la faute à de nombreux soucis techniques. Outre les soucis de caméras et de latence, Zau est incapable de parer les attaques ennemies. Si ce n’est via une esquive via un dash qui ne permet même pas de contre-attaquer. Pour ce qui est des déplacements, on a bien noté des soucis au niveau des doubles sauts, mais on finit par s’y habituer.

… ni son genre.

La direction artistique est un petit régal pour les yeux. En termes de design pure, ça reste assez sommaire, mais au niveau des décors, ça se pose là. Inspiré de la culture Bantoue, l’univers de Tales of Kenzera impose son style tout en élégance et en couleurs, tranchant avec la noirceur de son sujet, ce qui met en avant le propos du jeu. Un style visuel qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler l’univers de Black Panther. Pourtant, en dépit de sa beauté, il manque ce petit quelque chose qui aurait rendu l’exploration intéressante.

L’idée d’un metroidvania est d’être interconnecté par des zones, dont certaines ne sont accessibles que plus tard dans l’aventure. Ici, le cahier des charges est respecté. Mais la mécanique est censée s’accompagner d’un plaisir d’exploration qui est ici aux abonnés absents et on doit bien avouer ne pas avoir d’explication concrète. Est-ce par le peu de secrets à découvrir ?

Ou bien est-ce la lassitude à force de faire de longs trajets, ponctués par les incessantes zones d’arènes dont on parlait plus haut ? Des trajets que quelques feux de camps ne suffisent pas à raccourcir ? Il doit y’avoir un peu de tout ca. Au final, Tales of Kenzera donne davantage l’impression d’être un jeu linéaire qui aurait tenté d’implémenter maladroitement des mécaniques de Metroidvania pour donner davantage de profondeur au gameplay.

Un jeu qui a du cœur

En dépit de ces problèmes de gameplay et de game design, Tales of Kenzera dispose pourtant d’un très bon atout : son sujet. Ça semble facile à dire, tant on l’entend à toutes les sauces, mais pour le coup, Tales of Kenzera : Zau sent la sincérité à plein nez. Et c’est ce ressenti que l’on a, cette force qui nous donne envie d’aller au bout de l’aventure, même si on comprend dès le début le message sous-jacent du propos et donc là où le jeu compte nous diriger.

De la même manière qu’il a peut-être pu aider Abubakar Salim à accepter le deuil, on sent que le jeu cherche également à apporter cette aide à certains joueurs, et il en a le potentiel. Tales of Kenzera peut aussi compter sur l’excellence de son doublage. Pour plus d’authenticité dans votre expérience, nous vous recommandons de jouer dans la langue Kiswahili. En contrepartie, vous ne pourrez simplement pas profiter du travail vocal d’Abubakar Salim, ce dernier n’ayant doublé son héros que dans la version anglophone.

Enfin, on ne peut pas finir ce test sans mentionner l’ost sublime du jeu. Entre sonorités traditionnelles africaines, touches électriques et voix puissantes et envoutantes, les compositions de Nainita Desai, dont on avait déjà pu apprécier le travail sur Immortality et Telling Lies mérite très clairement une écoute à part, tant celle-ci envoute par sa puissance émotionnelle. Si seulement le jeu suivait complètement dans sa forme…

Conclusion de notre test de Tales of Kenzera : Zau

Tales of Kenzera : Zau nous met un tout petit peu dans l’embarras. Son sujet, touchant, est traité avec une telle sincérité qu’il est hors de question pour nous d’être trop sévère. Mais d’un autre côté, la première production de Surgent souffre de tares sur lesquelles il est bien difficile de fermer les yeux. Que cela vienne du gameplay, imprécis et n’exploitant pas suffisamment sa principale mécanique, ou bien son exploration, pourtant calqué sur le genre du Metroidvania, trop peu engageante.

Alors disons que pour son premier essai, Surgent s’en sort largement avec les honneurs. D’autant que la sincérité du propos s’accompagne de décors pas franchement désagréables à parcourir, sauf parfois dans ses phases de parkour ou de zones d’arènes. On pourra aussi compter sur les performances vocales pour apporter une touche d’authenticité, si tant est que vous privilégiiez en tout cas la version Kiswahili (on se gardera de donner notre avis sur une version anglaise que l’on n’a pas écoutée). Enfin, l’OST de Nainita Desai achève de nous entrainer dans ce voyage à la forme ludique imparfaite, mais au propos assez touchant pour nous emporter.

Tales of Kenzera : Zau est disponible depuis le 23 avril 2024 sur PS5, Xbox Series, Nintendo Switch et PC

Les points forts :

  • Un sujet traité avec justesse et sincérité…
  • La direction artistique, très jolie…
  • Un ost sublime
  • Les performances vocales en kiswahili
  • Durée de vie correcte (entre 8h et 10h, 12 pour tout compléter)…
  • Le concept du masque, pour des combats dynamiques…
  • Petit prix et inclus dans le PS+

Les points faibles :

  • … malgré un certain manque de subtilité
  • N’exploite pas au mieux le genre Metroidvania
  • … malgré un chara design et une identité graphique moins inspirés
  • Des zones d’arènes bien trop redondantes
  • … qui aurait pu être bien mieux exploité
  • de gros soucis d’imprécision dans le gameplay.
Graphismes
70 %
Durée de vie
60 %
Gameplay
45 %
Histoire
80 %
Bande-son
100 %

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Maximus
Maximus
Quelque part, dans un des millions d'univers infinis qui composent notre multivers, je déteste les jeux vidéos. Je n'y éprouve aucun intérêt et pire, je me montre particulièrement condescendant envers les "gamers". Mais c'est un autre univers.

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