3 ans après son annonce et une polémique (inutile) sur la couleur de peau d’Ariel, l’adaptation live de La Petite Sirène est enfin sortie en salle ce 24 mai 2023. On a vu cette version s’inscrivant dans la vague (haha) des remakes en live des classiques d’animation Disney. Bilan : Si c’est loin d’être le naufrage attendu ou vendu par certains, ce n’est pas non plus une totale réussite. Voici notre critique de La petite Sirène.
Des effets visuels trop vagues
La petite Sirène part avec un handicap qui devrait concerner tous les films prenant partiellement ou totalement place dans un océan en CGI jusqu’au 20 décembre 2024 : il sera comparé à Avatar 2. Une comparaison qui n’a pas vraiment lieu d’être, car d’un côté, on parle d’une oeuvre majeure dont la production s’est étalée sur près de 10 ans et de l’autre, un film qui s’inscrit dans une recette éprouvée de refonte live dont la production dure tout au plus 3 ans. Et avec un budget moindre en comparaison.
Alors, on va être compatissant et on ne va pas faire cette comparaison. Mais c’est quand même vilain. D’un côté, on a une esthétique pop, colorée qui fonctionne plutôt bien. Mais d’un autre, on a des séquences un peu trop sombres mais surtout un effet numérique bien trop prononcé, surlignant l’aspect kitsch de l’univers. Sans parler du rendu de certains habitants de la mer. On l’a tous vu et ça n’a trompé personne mais oui, Polochon est infect. Cela dit, il n’apporte strictement rien à l’intrigue, il pourrait voguer hors-champ qu’on ne remarquerait même pas son absence.
Sébastien tire plutôt son épingle du jeu. Si on est loin de l’expressivité du crabe dans sa version animée, le résultat est loin d’être laid ici, notamment grâce à ses yeux plutôt expressifs. Enfin, Eurêka à un design basique mais doit surtout à la performance vocale de Dorothée Pousseo et son énergie comique. D’ailleurs le casting vocal français est ici franchement réussi. Ce qui se vérifiera particulièrement dans les passages chantés. Certains de ces moments souffrent d’ailleurs de la comparaison au dessin-animé. Mention particulière pour la reprise de « Sous l’Océan » réussi sur le plan vocal, beaucoup moins sur le côté visuel assez pauvre.
Halle Bailey EST la petite Sirène
Comme souvent, Halle Bailey s’est attirée les foudres malgré elle dès qu’elle a été annoncé dans le rôle d’Ariel. Une levée de bouclier général dont nous nous passerons de commenter le ridicule, en particulier envers ceux ironisant de la situation en imaginant « Jean Dujardin dans le rôle de Kirikou« . Haha. Hilarant (et surtout hors-sujet). On va s’attirer encore plus de foudres : Halle Bailey est excellente en Ariel. Elle impose une véritable présence à l’écran par son magnétisme et sa performance impressionne d’autant plus qu’elle doit jouer face à du vide la plupart du temps, sans compter que l’on retrouve le caractère aventurier, curieuse et joueuse de la jeune sirène.
On ne peut pas juger de ses performances vocales, car nous avons vu le film en version française. Mais nous avons écouté ses chansons en libre accès sur les réseaux et sa voix est magnifique. Pour ce qui est du film, on se doit donc de souligner l’excellent travail de Cerise Calixte, jeune chanteuse et comédienne français. Ici, elle rend tout à fait honneur au talent vocal de Halle Bailey. Cette dernière nous semble cela dit un bon cran au-dessus. En revanche, on n’en dira peut-être pas autant de son Eric de prince. Physiquement, le choix de Jonathan Hauer-King colle plutôt bien mais le personnage reste assez effacé.
Une comparaison d’autant plus pertinente que hormis Polochon, quasiment tous les autres personnages s’imposent à l’écran. Nous parlions de Halle Bailey bien sûr mais on souligne aussi la performance de Javier Bardem qui en impose entre sagesse et tendresse dans le rôle de Triton et Melissa McCarthy qui frôle sans jamais la dépasser la ligne délicate du surjeu, omniprésente lorsque l’on joue un rôle de méchante tel que celui d’Ursula. On notera d’ailleurs la bonne idée d’en avoir fait la soeur du roi Triton. Ce qui donne un peu plus de sens à son rôle. On regrettera toutefois que la dimension comique du personnage ait été en grande partie rangée au placard.
Woke de fruits de mer
Sur la forme, cette adaptation live n’apporte pas grand chose de plus par rapport au classique animé. Un peu scandaleux quand le film se prend une heure supplémentaire au compteur. Toutefois, il a le mérite d’apporter un discours moins naïf et sans forcer le message progressiste. D’ailleurs, le scénario justifie par un détail tout simple la couleur de peau d’Ariel. Un choix qui constitue un pied-de-nez envers les détracteurs.
Elle ne tombe pas non plus instantanément amoureuse du prince Eric et ce n’est pas non plus par sa beauté que ce dernier la fascine mais bien par le courage dont il fait preuve. Sans compter qu’une nouveauté vient subtilement (non) s’ajouter dans le plan machiavélique d’Ursula destiné à piéger Ariel. Une idée qui s’inscrit là aussi dans la volonté de rendre le discours du film plus féministe, sans jamais forcer de manière outrancière sur le message)
En définitive, l’approche choisie ici par le film est malin en ce sens qu’il apporte un coté plus nuancé au récit. Et ce sans le dénaturer et sans rien insérer au forceps. Mais on aurait préféré voir se développer plus de choses. Comme on l’a dit, une heure de plus, c’est beaucoup. C’est même trop quand ça n’apporte rien de nouveau sur la forme. C’est plutôt dommage, au vu des éléments mis en place pour mieux coller aux standards actuels de ce que certains appelleront « l’ère Metoo« .
Conclusion critique La petite Sirène
On passe un bon moment devant cette refonte de La petite Sirène. Porté par la magnétique Halle Bailey dans le rôle éponyme, le film peut également compter sur un casting solide autant pour les acteurs de chair et d’os autant que pour les rôles vocaux. Toutefois, le résultat n’est visuellement pas à la hauteur de son homologue animé. Un constat d’autant plus amer sur certains des passages chantés, sur lesquels on perd une bonne partie de la verve et de la magie.
On félicite par ailleurs le discours moins naïf et plus en phase avec les tendances actuelles. On aurait cependant aimé que cet apport ne se limite pas à un discours de fond. Qu’il apporte une véritable plus-value sur la forme. Surtout compte tenu de la bonne heure supplémentaire ajoutée au compteur. Mais au final, c’est bien le résultat visuel qui s’avère en déca de tout le reste. Et on n’en est pas si mécontent. Déjà parce que Avatar 2 restera toujours au-dessus (oups, on a craqué) et ça nous aurait miné d’être contraint d’admettre que Halle Bailey n’était pas à la hauteur, si ça avait dû être le cas.