Dans Évanouis (titre francophone qui sonne moins évident que le Weapons qui sert de version originale), Zach Creggers, qui signe ici son second film après Barbare, revient pour conter la mystérieuse disparition d’une classe d’enfants au sein d’une bourgade, le tout dans un film d’horreur chorale depeignant une version peu idéalisée des États-Unis.
Les frères Grimm, Stephen King et Jordan Peele sont dans une pièce…
Une petite bourgade en apparence sans histoires et en voix off, celle d’une innocente petite fille. Une voix se mettant à conter ce qui ne rends finalement pas cette petite bourgade de Floride si tranquille. Voilà comment Évanouis commence. Mais l’innocence présumée des premières minutes du film de Zach Creggers laisse très vite place au mystère, au deuil. À toute la lourdeur d’un évènement aussi mystérieux et tragique que la disparition d’enfants, tous issus d’une même classe, à l’exception d’un seul, volatilisés à la même heure précise au cours de la nuit. L’enquête de la police piétine, la maîtresse de la classe (excellente Julia Garner) devient la coupable idéal, toute portée sur l’alcool qu’elle est, et certains parents tentent tant bien que mal de démêler les fils d’une affaire que même les autorités ne parviennent à dénouer.
Pour raconter ce récit totalement original, Zach Creggers lorgne beaucoup du côté de Stephen King et, à l’instar de Jordan Peele (qui fut fortement interessé par le projet), y traite de certains maux de l’Amérique profonde. Car pour recoller les pièces du puzzle, Creggers plonge dans la psyché de différents personnages, dont on suit le parcours parallèle, comme dans un bon petit film chorale, façon Magnolia ou Collision. De la maîtresse portée sur la paranoïa et l’alcool, on passe au policier dépressif et corrompu, traquant un junkie, dont on suit également le parcours, jusqu’à un père endeuillé et au passif vraisemblablement peu flatteur. La méthode qu’emploie ici le cinéaste s’avère tout particulièrement efficace dans le sens où elle maintient l’éveil du spectateur.
Un thriller tragi-comique chorale
De base, le scénario à de quoi intriguer et émouvoir, la disparition d’enfants n’étant jamais innocente. Mais Creggers ne se contente pas d’en tisser un banal film d’horreur sur fond de disparitions intriguantes. Il en fait le moteur d’une oeuvre chorale tant dans son concept que les quelques différences de tonalités au gré du parcours des personnages. Évanouis est avant tout un savant mélange de film épouvante et de thriller, avec toute la tension et le suspense que ca implique et juste ce qu’il faut de jumpscares pour faire sursauter sans surdoser. Mais Évanouis, c’est aussi un drame social et ca prends parfois des virages vers la comédie plus ou moins absurde.
Le plus gros de ce virage intervient d’ailleurs vers la révélation finale et il faut bien dire que celui-ci peut autant plaire que désarconner. Avec Évanouis, mieux vaut ne pas avoir une idée précise de ce que l’on va voir avant de le voir, car le film prend soin, et avec un malin plaisir, de casser toutes les attentes que l’on peut en avoir. Mais c’est justement cet effet de surprise qui le rend si efficace. Contrairement à beaucoup de films de genre, Zach Creggers sait parfaitement où il va. La structure déconstruite de son récit, avec ses différents cheminements mènent au même point final. Un point final qui sera peut-être le seul à nous faire regretter le voyage justement, tant celui-ci s’achève sur une touche d’inachevé, que certains qualifieront de grand-guignolesque. Ca fera rire dans tous les cas mais pas toujours apprécier, en fonction de vos attentes.
Résumé de notre critique de Évanouis
Avec son titre original de Weapons, bien plus en rapport avec les thèmes du film que le banal « Évanouis » qui sert de traduction française, on peut comprendre pourquoi Jordan Peele était si subjugué par le scénario (Creggers l’avait mis aux enchères, à la recherche d’un producteur) et la frustration qu’il en aurait ressenti après avoir l’avoir perdu face à la Warner. Évanouis n’est pas un simple thriller horrifique, qui serait une sorte de croisement bâtard entre Stephen King et les frères Grimm. C’est aussi un surtout un film chorale qui vire beaucoup au drame social et parfois à la comédie absurde.
Creggers, qui réalisera d’ailleurs sa propre adaptation de Resident Evil l’an prochain ( et on a totalement envie d’y croire) y insuffle une tension permanente, agrémentée de 2-3 jumpscares par-ci par-là et utilise le concept de film chorale pour y approfondir une certaine complexité dans les personnages que l’on suit. Le junkie survivaliste, le policier depressif et corrompu, la maîtresse parano et alcoolique, le père en deuil… Beaucoup y passent, sous le biais d’un casting particulièrement impliqué (Julia Garner en tête) et ca marche parfaitement, même si la partie liée à la révélation finale pourra en refroidir certains, sûrement à juste titre.
Évanouis, un film thriller-épouvante de Zach Creggers, en salle le 6 août 2025.